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lundi 19 mars 2012

Jazz Manu

Musique

Le saxophoniste s’est penché avec bonheur au chevet de ses musiques du monde noir qui ont marqué le cours de l’histoire humaine récente.

Depuis qu’il a commencé à flirter avec la musique, Manu Dibango n’a jamais cessé de martelé combien les grands jazzmen et bluesmen l’ont aidé à façonner son imaginaire créatif et son chemin. Lui qui à la moindre occasion ne manque pas de leur rendre hommage en parcourant leurs compositions à sa sauce personnelle pour le plus grand bonheur de ses fans et mélomanes. Une posture qui est loin d’être facile quoi que l’on entende souvent de la bouche de ses contempteurs quelque diatribe suivant laquelle ce penchant serait en fait signe de faiblesse de créativité.

Le divin chauve lui n’en a cure. Lui qui poursuit un chemin sur lequel -plus que certains- il se sent à l’aise. Il y a 20 ans, c’était en octobre 1992, il bouclait le 2è volet de son magnifique Négropolitaines où il rendait hommage aux musiques d’Afrique à travers un album instrumental qui fit du bruit et dont quelques effluves, consacrées depuis par la radio nationale, continuent de bercer les mélomanes camerounais. Depuis, il a aligné d’autres albums à la sauce instrumentale comme ce magnifique Sax Spirituals qu’il publia quelques temps seulement après le décès de sa compagne Coco quelques années plus loin.

On en était encore à savourer son fameux hommage à Sidney Bechet que voilà l’éléphant –c’est la signification de Dibango en français- nous revient avec un album instrumental de 20 titres intitulé à juste titre Ballad Emotion. Un cru qui date de juin dernier et qui promène le mélomane dans un univers qu’il connaît bien puisqu’il s’agit de reprises de grands classiques du jazz, du blues et de la soul mâtinées d’un sax qui emprunte tantôt le ténor tantôt l’alto. Composant du même coup une combinaison qui apaise et chatouille l’ouïe avec une simplicité comme sait le véhiculer un Manu au faîte de son talent.

Un album qui convient d’écouter pendant le repos ou la méditation, sans que cela ne confine à la musique classique. Car comme souvent chez Manu, le saxophone est de rigueur, parfois même envahissant. Il s’attache aussi à imprimer à l’ensemble cette orchestration que permet la rythmique adossée à la basse et à la batterie, jouées sans précipitation et avec une posture d’étirement qui en rajoute à une tension qui s’instille bien tranquillement chez l’auditeur.

On pourra toujours reprocher la quantité des titres repris, les choix, le fait que cette relecture ait pris l’option de ne pas trop rentrer dans les rythmes de chez lui comme ce fut le cas notamment avec le projet Négropolitaines. N’empêche qu’à l’écoute, le travail est plus qu’appréciable et qu’il ne dénature en rien les versions originales. Et lorsque l’on sait combien les reprises sont difficiles et parfois capricieuses, l’on ne peut que saluer ces ballades plus qu’émotives qui s’inscrivent, sur la planète Manu, dans nombre d’autres aux saveurs souvent corsés, mais toujours édifiantes comme ce fût le cas par le passé avec des albums comme Wakafrica ou Kamer All Stars pour ne parler que d’eux.

Parfait Tabapsi


Manu Dibango

Ballad Emotion

Edité chez EGT

Paris, juin 2011

A écouter : What a wonderful World, Summertime, I got You, Fa-Fa-Fa-Fa-Fa

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