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lundi 27 mai 2013

2è guerre mondiale en France : Solidarité, maquis et trahison


Littérature
Avec Le terroriste noir, Monénembo rend hommage à un soldat africain qui organisa un maquis de la résistance pendant l’occupation allemande.

Pour moi qui n’avais encore jamais lu Tierno Monénembo, Le terroriste noir a été une belle rencontre. Une de celles qu’on oublie difficilement quand on est passionné par la littérature et l’Afrique, ce continent dont on n’a décidément pas fini de raconter ou de romancer l’histoire des héros qui au fil des œuvres, et qui épousent des batailles et des causes humaines tout simplement. Avec son dernier roman, Monénembo met en scène dans un village français, et ce durant trois ans, la vie d’un tirailleur d’origine guinéenne qui du haut de son expérience militaire organisa la résistance à l’occupant allemand. Ce «Quelqu’un qui, à un moment où sa race passait pour la plus vile de l’humanité, a réussi à s’imposer sur tout un canton de France» (P.178) Un militaire fier et sociable à souhait qui en ce laps de temps a réussi à marquer l’histoire d’un village des Vosges au point d’être reconnu bien de décennies par la municipalité qui érigera un monument en sa mémoire.

Sur le plan esthétique, l’auteur a choisi le je narrant placé dans la bouche d’un tiers, en l’occurrence une admiratrice de ce héros de la résistance. Mais il n’y a pas que cela ! La narration est bien ancrée dans le parler local de la langue française qui en rajoute sur la vraisemblance. Il y a certes quelques zones d’ombre où le lecteur aurait aimé en savoir davantage, mais cela accroit l’intérêt de la lecture. Si bien qu’à la fin toute l’histoire est reconstituée dans la tête du lecteur.

Pour ce qui est des leçons que le livre suggère, il y en a plusieurs. D’abord l’esprit de solidarité que les villageois auront manifesté à l’égard d’Addi Bâ en le recueillant, en lui offrant gîte et couvert, en le couvrant de leur affection et en le protégeant de leur mieux de la menace allemande constituée de la Gestapo et de l’armée de Hitler qui sillonnaient en ces temps d’occupation le village et le voisinage. Addi Bâ à son tour le leur a bien rendu en ayant un comportement des plus sains. Ne cherchant pas par exemple à profiter des avantages de l’uniforme, mais mettant son expérience en faveur de l’organisation d’un maquis structuré à la barbe de l’occupant qui finira malheureusement par le démasquer à partir certainement d’une trahison qui demeurera un mystère. De voir ainsi un village français être solidaire d’un Africain en ces temps de colonisation tous azimuts, de guerre et d’occupation ne peut qu’interroger sur la tolérance qui semble avoir foutu le camp chez les officiels français 50 ans plus loin.

L’autre leçon que l’épopée de Bâ dans les Vosges enseigne c’est que le désir de liberté et de libération n’a pas de frontières et que tout le monde peut y contribuer en jouant sa partition. Certes d’autres œuvres ont montré comment la France dût son salut aux étrangers, notamment avec le débarquement de Normandie, mais de voir ainsi un soldat d’origine africaine organiser le maquis de la résistance dans le pays profond n’est pas courant dans l’univers de la créativité artistique et littéraire. Ce faisant, le livre pose la lancinante question du sort de ceux qu’on appela les tirailleurs ; eux qui continuent à jouir de broutilles à côté de leurs camarades français. Ce sort-là continuera-t-il e durer et de les apitoyer ? Monénembo a pour sa part ouvert la voie de la reconnaissance tout au moins, avec en filigrane, on le devine, l’espoir que les gouvernements français iront plus loin. C’est à ce prix-là sans doute que cette autre blessure de la 2è guerre mondiale sera pansée.

Parfait Tabapsi

Tierno Monénembo, Le terroriste noir, Paris, Seul, août 2012, 230 pages

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