Innovation Arts plastiques
Alexander Koch. |
C’est dans la cour
de Doual’art, en marge du Salon urbain de Douala (SUD 2013), que ce curateur allemand nous a expliqué les ressorts d’un concept
qui tente d’investir l’Afrique.
Comment vient au
monde ce concept ?
L’artiste plasticien belge François Hers a cherché
pendant longtemps un autre modèle pour créer des liens dans la réalité sociale,
la responsabilité des gens et la création culturelle. Il était clair depuis
longtemps que ce rapprochement était nécessaire. Il y a même aujourd’hui toute une
histoire de l’art participatif pour répondre à cette exigence. Hers avait
trouvé qu’il y avait un problème avec l’approche suivant laquelle ce sont les
artistes qui vont vers la société. C’est-à-dire qu’on est toujours dans une
structure de l’offre (compétence, création) ; les citoyens n’ayant guère
la possibilité d’aller vers les artistes pour articuler une démarche. La
question qui se pose dès lors c’est : comment peut-on créer un modèle, une
pratique qui permet au citoyen et à toute personne d’articuler une démarche
basée sur leurs désirs, besoins, urgences, conflits, rêves, etc. ?
Et c’est la
recherche des réponses qui a abouti à cette trouvaille j’imagine. Comment dès
lors s’opérationnalise-t-elle ?
Le modèle «Nouveaux commanditaires» offre une réponse
qui est un réseau de médiateurs culturels indépendants et qui rentre en contact
avec les individus, c’est-à-dire plus précisément qu’ils reçoivent des
demandes, de vagues idées des gens qu’ils rencontrent dans leurs univers
respectifs. Ils rentrent dans un échange avec les gens avec pour but de
développer une compréhension plus profonde de ce que veulent les gens, afin de
pouvoir finalement choisir un art qui sera proposé pour une commande précise. A
un moment donné donc, il y a une phrase ou deux sur les exigences que
souhaitent les gens sur les œuvres à implanter chez eux. Cette procédure permet
aux gens d’entrer en collaboration avec des artistes expérimentés, et donc de
participer avec une plus grande responsabilité dans la production culturelle de
nos jours. Cette approche permet aussi d’éviter des préjugés de la part des
commissaires ou institutions d’art sur les besoins des gens et de faire un
choix d’artistes et de médiums idoines. En conséquence, il y a toutes les
pratiques culturelles qui sont inhérentes à la pratique du programme «Nouveaux
commanditaires» et qui vont de l’architecture aux arts plastiques en passant
par la musique, le théâtre, la littérature, le cinéma, la danse, etc.
Quelles est l’étape
suivante ?
L’artiste choisi va à la rencontre des commanditaires
et après un échange, il va développer un projet qu’il va proposer. C’est la
première phase qui est en soit très intéressante parce que souvent il y a un
processus de compréhension/négociation entre l’artiste et le commanditaire car
ils appartiennent souvent à des réalités différentes. Il y a une nécessité,
mais également une occasion de créer une relation de confiance et de
collaboration qui normalement n’existerait pas. La proposition peut subir des
amendements pour l’affiner. Une fois tout le monde d’accord, la 2è phase qui est la réalisation commence,
avec l’accompagnement du médiateur qui va aider à trouver des financements. Une
3è phase existe qui est la prise de responsabilité des commanditaires sur
l’œuvre à travers notamment la médiation envers leurs connaissances. Ce
programme encourage ainsi les gens à comprendre une production culturelle comme
un élément de la vie en société.
Quels sont les
résultats de la matérialisation de ce concept à ce jour ?
Le 1er travail de médiation a commencé en
France il y a 20 ans. Avec son bon fonctionnement, d’autres pays européens sont
entrés dans la danse, au point d’être une bonne douzaine aujourd’hui. Plus de
100 projets basés sur des décisions prises entièrement par des acteurs locaux ont
été réalisés. En 2007, nous avons initié le chapitre d’Allemagne, et avons déjà
réalisé trois projets ; plusieurs autres sont en cours. En 2012, je me
suis posé la question de l’exportation de ce programme sous d’autres cieux. Où
l’on recherche un développement de la société civile en même temps qu’un
développement culturel. Après le Nigéria et l’Afrique du Sud, je suis au
Cameroun avec cette proposition comme une contribution au débat sur le rôle et
la place de l’art dans la société. Je serai content de partager mon expérience
et de collaborer dans le cadre de ce réseau international de médiateurs.
Recueillis par
Parfait Tabapsi à Douala
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